Voici une partie du poème “Al
otro lado” ( De l’autre côté) de Alvaro Cunqueiro,
grand
poète Galicien.
De
l’autre côté
Le
rêve monte par les veines de l’arbre
une
vie entière qui passe
jusqu’à
devenir oiseau sur une branche
un
oiseau qui se souvient, chante et s’en va
peu
avant que tous les arbres ne meurent.
Si
je deviens vieil arbre de l’autre côté de la rivière
et
je dois être l’arbre qui se souvient et rêve
tu
peux être bien sûre que je rêverai de toi
de
tes yeux gris comme l’aube
et
de ton sourire
dont
s’habillèrent les lèvres des rosiers
aux
jours les plus heureux.
Alvaro Cunqueiro
(Trad:
Colo)
Manuel Abelenda Zapata, peintre Galicien (A Coruña, 1889 - A Coruña, 1957) El río del Burgo
AL OTRO LADO Alvaro Cunqueiro El
sueño va subiendo por las venas del árbol
una vida entera que
pasa
hasta hacerse pájaro en una rama
un pájaro que
recuerda, canta y se marcha
poco antes de que todos los árboles
mueran.
Si yo me hago árbol viejo al otro lado del río
y
me toca ser el árbol que recuerda y sueña
puedes estar bien
segura que soñaré contigo
con tus ojos grises como el alba
y
con tu sonrisa
con la cual se vistieron los labios de los
rosales
en los días mas felices.
C’est une chance, cette fois
le livre qui m’a plu et émue est traduit en français. Il s’agit
de (le titre français) “
Les adieux de Gabo et Mercedes”, écrit par Rodrigo, le fils de
Gabriel García Marquéz.
On
se demande d’abord pourquoi ce fils, Colombien donc, l’a écrit
en anglais. (il l’explique). Et son titre anglais est “Memoir”.
Fort différent donc, mais c’est bien entre la vie et l’adieu
définitif que se déroule ce récit, beau et émouvant.
Au
fil de chapitres courts, Rodrigo raconte les derniers jours de son
père, les funérailles, l’après.
Le
récit, parfois triste, parfois teinté de douce ironie ou d’humour,
relate autant la vie de son père, de sa mère Mercedes qui est
“politiquement peu correcte” et pleine de vie, de force, que la
sienne, celle de son frère, de leurs familles et proches, et puis
les souvenirs.
Le
récit est structuré autour de citations de différents romans de
G.G Marquéz. C’est fort intéressant. Des anecdotes relient des événements, parfois minuscules, aux grands romans de l'auteur.
Des
années avant son décès il avait comencé à perdre- puis tout à fait perdu
la mémoire, “un drame pour un écrivain”. Mais c’est avec
humour que Gabo (surnom de son père) disait: Je perds la mémoire
mais par chance j’oublie que je suis en train de la perdre.
“Nous
avons trois vies: la vie publique, la vie privée, puis les secrets”
disait-il.
Rodrigo
nous balade entre ces vies, la disparition de son père est,
inévitablement, un événement public, mais il réussit à doser
parfaitement son récit et on entre dans une pudique intimité avec
Garbo.
Cette
facette de GG Marquéz m’était inconnue et voilà que hier j'ai reçu un livre posthume de lui" En agosto nos vemos" (Nous nous voyons -verrons?, en août).
Juan avait toujours parlé
par les coudes (hablar por los codos),
intarissable depuis son enfance. Souvent, faute de compagnie, il
parlait seul et là aucune limite à ses rêves, projets.
Intelligent et bon élève, ses
parents lui conseillèrent de devenir avocat: “avec une telle
verve, ce sera “coudre et chanter” (coser
y cantar) " disaient-ils.
Juan les avait crus.
Une fois ses études terminées
il pensa, oh erreur, que ce serait “arriver et baiser le
saint”(llegar y besar el santo)
Jamais il ne s'était imaginé
qu'autant de concurrents se présenteraient au même poste d'avocat
de l'entreprise BUHO. On lui donna le numéro 22, chose qui le laissa
à carreaux (quedarse a cuadros).
Dans la salle d'attente il
rencontra l'ancien avocat de la boîte qui lui dit: celui qui veut
des poissons doit se mouiller le cul (el
que quiera peces que se moje el culo).
Les autres candidats, tous
fort bavards, s'approchèrent et une discussion fort animée
s'ensuivit.
Fort animée et de plus en plus
bruyante, au point que l'avocat général renvoya chaque hibou à
son olivier (cada
muchuelo a su olivo)
C'est penaud que Juan rentra
chez lui; il avait pris sa décision: il deviendrait oiseleur.
"L'OISELEUR INDOU", AUGUSTE DE WEVER (Belgique, 1836-1910)
C’est
vraiment par hasard que ce matin à l’aube j’ai vu que le 6 avril
est le jour où est décédé Jacques Higelin. En 2018.
Homme
aux multiples talents, souvent décalé, j’ai retenu, je le trouve très inspiré, ce poème
qu’il a mis en musique et chante. Vous connaissez peut-être la
chanson si vous êtes de ma génération...
Tête
en l'air
Texte
/ Chanson de Jacques Higelin
Sur
la terre des damnés, tête en l'air,
Étranger aux vérités
premières énoncées par des cons,
Jamais touché le fond de la
misère
Et je pleure, et je crie et je ris au pied d'une fleur
des champs,
Égaré, insouciant dans l'âme du printemps, cœur
battant,
Cœur serré par la colère, par l'éphémère beauté
de la vie.
Sur
la terre, face aux dieux, tête en l'air,
Amoureux d'une émotion
légère comme un soleil radieux
Dans le ciel de ma fenêtre
ouverte
Et je chante, et je lance un appel aux archanges de
l'Amour.
Quelle chance un vautour, d'un coup d'aile d'un coup de
bec
Me rend aveugle et sourd à la colère à la détresse de la
vie.
Sur
la terre, tête en l'air, amoureux,
Y'a des allumettes au fond
de tes yeux,
Des pianos à queue dans la boîte aux lettres,
Des
pots de yaourt dans la vinaigrette
Et des oubliettes au fond de
la cour…
Comme
un vol d'hirondelles échappé de la poubelle du ciel...